Pour beaucoup, et l’auteur de ces lignes en fait partie, Bill Callahan est un monument. L’ancien Smog s’est d’abord fait une réputation de dur à cuire dans les années 90, d’inconsolable ténébreux au timbre caverneux, avec une petite douzaine de disques sombres dont certains frisent franchement l’austérité. Puis, un beau jour (peu après sa rencontre avec la chanteuse Joanna Newsom, diront les amateurs de potins), l’intraitable Callahan s’est mis à enregistrer des disques sous son nom… et il est sorti peu à peu du brouillard. Sa voix grave dirige toujours le bal, mais sur des mélodies volontiers plus douces, une instrumentation acoustique, qui s’étoffe de temps à autre d’une flûte ou d’un violon. Les morceaux de bravoure, avec leur lot d’intensité, n’ont pas disparu pour autant : rassurons-nous, l’Américain n’a pas tout à fait remisé ses angoisses au placard. Le 12 février, il viendra défendre les couleurs (des belles nuances de gris, parfois très éclatantes) de son nouveau disque Dream River, sur les planches d’une salle parisienne qui n’avait jamais été aussi grande. Alors, certes, ce nouvel album ressemble un peu au précédent, qui avait lui-même des réminiscences de celui d’avant. Mais on pardonne tout à qui a atteint un tel niveau de maîtrise. D’autant plus quand on sait s’entourer d’aussi bons musiciens en concert. Ne nous attendons pas à une grand-messe conviviale (le bougre n’est pas connu pour être très bavard), mais la rencontre avec le public parisien risque d’être une nouvelle fois passionnante.

—  JC